WANDA - business is business. uc.

Date et Lieu de Naissance ▬ 4 mars 1982. à Syracuse ; ici même donc.
Statut Marital ▬ divorcée, célibataire.
Occupation ▬ styliste, à ses heures perdues. mais que diraient ses clients s'ils savaient qu'elle était et est toujours une voleuse au combien expérimentée ? sûrement peu de choses "biens", dirons-nous.

« Wanda ? Allez-vous en. Ce n'est plus ma fille. C'est une créature du diable. Plus personne ne peut la sauver. » Je rôdai près de la maison lorsque je l'avais entendu dire cela. Mon père avait toujours été d'un naturel franc. C'est pourquoi, je ne revins plus à la maison. Je crois que c'était ma professeur de mathématiques qui avait sonné à la porte, ce jour-là. Elle n'était pas bien méchante, juste un peu trop curieuse et honnête pour que je puisse l'apprécier réellement. De toute manière, ce fut la dernière fois que je la vis, elle aussi. J'avais seize ans à l'époque. Les études, je les avais délaissés depuis bien longtemps, alors je m'étais dit "à quoi bon continuer ?". Je n'ai jamais eu de motivation pour les choses qui ne m'intéressaient pas. Je m'étais débrouillée toute seule. De toute manière, moi non plus, je ne considérais plus cet homme comme mon père. Et ce depuis bien longtemps. Cet homme était mon géniteur, point barre. Il n'y a peut-être pas une grande différence entre les mots "père" et "géniteur", pourtant à mes oreilles ils ne sonnaient vraiment pas de la même manière. Mon géniteur venait donc de me foutre à la porte. Une bonne fois pour toute. Derrière le panneau où je m'étais cachée. Je murmurai quelques mots, avant de m'aventurer, seule, dans les rues obscures de Syracuse. « Au revoir... papa. » Oui, j'avais mal. Après tout, à partir d'aujourd'hui, je n'avais plus de famille. Cela me faisait peur. Je n'étais pas wonder woman, j'avais la frousse. Mais, maintenant, il était hors de question de je continus à vivre sous le même toit que cet homme. Un chrétien convaincu mais alcoolique et violent, il n'était que cela. Rien de moins, et peut-être beaucoup plus. Je n'allai pas chez les voisins, chez des amis ou même chez les flics. Les voisins me haïssaient, ils savaient que je les avais cambriolés, à plusieurs reprises. Mais faute de preuve, personne ne pouvait réclamer un quelconque dédommagement. Je m'étais bien remplie les poches, et mon père me les avait bien vite vidées. Non pas pour redonner ce qui ne lui appartenait pas, mais pour parfaire son stock de bières. Mes amis, comme si, à Syracuse, on pouvait avoir de véritables amis. Comme si. Les flics ? Plutôt crever. Il était hors de question de j'aille de mon plein gré chez les poulets. Hors de question. J'avais des choses à me reprocher, je n'étais pas idiote. Même s'ils n'avaient pas de preuves, je n'avais aucune envie de me jeter dans la gueule du loup, surtout aussi facilement.

« Voilà où tu vivras, à partir de maintenant. » « Merci. » Au revoir. C'était ce que j'avais sous-entendus. J'avais un toit maintenant. Un peu de fric aussi. Mais, là, j'avais pris une décision. Maintenant j'avais besoin d'y réfléchir. Je savais que c'était complètement con. Carrément débile. J'avais dit "oui", et je voulais réfléchir à ce que j'aurai dû dire. Mais tout ça, après l'avoir dit. En fait, j'avais mal au crâne. Je venais d'accepter d'aider la famille Cipriani. J'allai cambrioler chez des gens pour la mafia. Je faisais peut-être une grosse connerie. Merde. Après quelques minutes d'auto apitoiement sur moi-même, je regardais autour de moi. Le gars n'était plus là. Depuis combien de temps j'étais restée plantée là, à me demander si j'avais pris la bonne décision ? Je ne savais pas. Je m'avançais. Il y avait une cuisine. Une cuisine rien que pour moi. J'ouvrai le frigo. Il n'était pas vide, contrairement à ce que je m'attendais. Quelque chose me choquait presque, aucune cannette de bière n'était entreposé à l'intérieur. Non, aucune. Chez mon géniteur, il n'y avait que cela dans le frigo. Cela et un paquet à moitié vide de gruyère. Non. Là, était rangé des yaourts, du jambon, des fruits. Je restais là à m'extasier devant un frigo qui n'avait rien d'extraordinaire. J'étais peut-être atteinte, au final. Je refermais le frigo. Je savais d'or et déjà que je n'utiliserai jamais le four. Je n'avais pas envie de foutre le feu au seul endroit où je pouvais retourner. J'étais peut-être atteinte, mais il me restait un minimum de bon sens. J'étais vraiment une cuisinière pathétique, point barre. Il n'y avait pas de télévision, pas d'ordinateur. Tant pis, je m'en passerais. J'avais un toit et de la bouffe, c'était le principal. Je retournais vers la porte d'entrée, rassurée en voyant le verrou. J'étais chez moi, chez moi putain ! Je rigolais. Heureusement que j'étais seule ; on m'aurait pris pour une psychopathe, dans le cas contraire. Je m'asseyais par terre. Ils m'avaient dit que j'avais du potentiel. Que si je cambriolais quelques maisons pour eux, je pourrais vivre tranquille. C'était peut-être une connerie, c'était peut-être mal. Mais je n'étais plus à ça près. La route qui m'était tracée était loin d'être celle d'une bonne sœur, ni celle d'une martyre. Je fouillais dans mon vieux manteau en cuir, pour en ressortir un petit mp3 noir. Je l'avais piqué, bien évidemment, et, maintenant, il me suivait partout. Je posai un écouteur sur mon oreille droite, tandis qu'un solo de guitare résonnait à l'intérieur. Je me laissai tomber. M'étalant de tout mon long sur le sol froid. Soupirant, je regardais le plafond. Ce que je faisais était sûrement 'mal', mais, j'avais abandonné depuis bien longtemps ce qui me restait de conscience. En supposant que j'en ai un jour eut une. Aujourd'hui, je me sentais bien. Je réfléchissais déjà à mon avenir. Il me faudrait sûrement une couverture, il faudrait sûrement que j'ai un métier, pour ne pas trop éveiller les soupçons. Je m'endormis ainsi, sur le sol. Rêvant d'un futur meilleur. Du haut de mes seize années, je me promis de ne plus jamais errer dans les rues en tant que clodo. Plus jamais.

« Je t'aime. » Moi non plus. C'est ce que j'aurais bien aimé lui répondre. Mais, je ne pouvais pas me le permettre, pas avec les projets qui trônaient dans ma tête depuis à peu près deux ans. Je me contentai donc d'un « Moi aussi. », assez convainquant pour qu'il y croit. Assez hypocrite pour qu'il tombe dans le panneau. J'observais son visage, avec une passion feinte, tandis qu'il faisait une sorte de zoom sur ma bouche. Cela me dégoûtait réellement, mais je l'embrassai. Cela fut très bref, mais trop lent à mon goût. Ses lèvres gercés avaient un goût semblable à celui de la figue. Je détestais les figues. Je lui lançai un sourire chargé d'un amour aussi faux que le soi-disant tableau de Picasso qui trônait dans le salon de cet homme, tellement naïf. Mais quel abruti, quel crétin. Un crétin plein aux as, bien heureusement. Il fallait bien qu'il y ait une petite compensation. J'étais sûrement chanceuse ; mais je ne croyais pas aux coïncidences, ni au destin. Ce cher monsieur était âgé d'une cinquantaine d'année. Il était juge d'instruction, et il n'avait pu obtenir son métier que par le piston. Du moins, c'était la seule explication logique qui expliquait qu'il puisse croire qu'une fille de vingt-deux ans soit tombée sous charme tout en étant juge : métier qui n'était pas donné à tout le monde. Il me dégoûtait, vraiment. Je le regardai partir à son boulot. Je commençais à saturer. Certes, j'étais une reine de l'hypocrisie, mais cela faisait bientôt deux ans que je faisais semblant ; j'en avais marre. Je me retournais, enfilais mon manteau. Manteau fait de mes propres mains, signé Wanda Sandrucci. Je prenais mon sac, jetais un dernier coup d'oeil sur l'immense appartement. Je sortis à mon tour, puis me dirigeais vers mon magasin. Oui, mon magasin. Le vieux ne servait qu'à cela, à me donner les choses dont je rêvais mais, à quoi je n'aurais jamais pu accéder avec le faible revenu que m'accordait la famille Cipriani. J'en avais bien profité. Aujourd'hui, je pensais à demander le divorce ; j'avais obtenu ce que je voulais : un magasin. Après que la mafia m'ait « sauvée », j'avais tout de suite compris qu'il me faudrait une couverture. Un métier. Seul le stylisme s'était imposé à mon esprit. J'avais piqué une machine à coudre chez la grand-mère du coin quand je vivais encore chez mon géniteur. Il paraissait que j'étais un peu douée. Enfin, j'étais styliste à présent, une véritable styliste. Je créais des vêtements et j'avais déjà quelques clients. Mes prix n'étaient pas très élevés. En réalité, je les ajustais en fonction de mes clients et clientes. Ce n'était pas très honnête, mais je n'avais jamais prétendu l'être et ne l'avait jamais vraiment été. J'entrai dans mon magasin, mon antre. Je n'avais pas d'employés, j'avais toujours travaillé à mon compte, et cela n'était pas près de changer. Ce soir, je devais pénétrer dans la maison d'un nouveau riche du coin. Je n'étais pas 'stressée'. J'avais prévu le coup, balisé le terrain. Livio m'emmènerait, jouant le rôle de chauffeur et de guet ; comme d'habitude. J'ouvrai un tiroir dans un bureau de mon petit atelier, une pièce située à l'arrière du magasin. Une procédure de divorce apparut sous mes yeux. Je souris, ce dossier annonçait la liberté, ma liberté. Bientôt, je serais libérée de ce fardeau qu'était mon 'mari'. J'avais hâte.